une rencontre longtemps fantasmée

Chercher un job avait bien sur été sa priorité en arrivant au Japon et il avait essayé de se concentrer là dessus. Pourtant une vision, une seule parmi la foule de choses nouvelles et merveilleuses qu'il avait vu à partir de l'instant où il avait débarqué, avait réussie à le détourner de toutes ses résolutions.
Il ne pouvait s'empêcher de revoir la nuit en rêve le visage d'un jeune garçon et surtout ses yeux d'une couleur si profonde. Ses yeux, sa bouche, finalement le souvenir de Liam était comme tous les souvenirs, imprécis, il ne pouvait plus revoir le jeune homme comme s'il l'avait devant les yeux, ses rêves se focalisaient sur des détails. Mais ils se focalisaient tant et si bien que Liam fini par craquer. Il se renseigna sur les okiyas et prit l'habitude d'aller trainer dans le quartier après son boulot jusqu'à ce qu'il parvienne à savoir dans quelle okiya travaillait le fameux jeune homme aux yeux d'émeraude.
Il réussi à obtenir un rendez-vous avec lui. Liam n'avait eu qu'une seule obsession pendant plusieurs semaines: le retrouver.
Le voilà sur le point de passer un moment en tête à tête avec l'objet de ses fantasmes et il se rendait compte avec appréhension qu'il ne savait pas quoi lui dire ! Devait il lui avouer de but en blanc qu'il passait ses nuits à lui rouler des pelles et qu'il était venu le voir dans l'espoir que ce fantasme prenne forme dans un avenir pas trop lointain ? Certainement pas ! Si le jeune maiko se demandait pourquoi cet étranger l'avait choisi lui plutôt qu'une geisha expérimentée pour lui faire découvrir cette façon typiquement japonaise de se distraire, quelle explication crédible pourrait il lui raconter ?
Il n'avait plus le temps de mettre au point un plan. De toute façon même si il avait écrit à l'avance ce qu'il devait dire, en face de son fantasme il aurait tout oublié alors ce n'était pas bien grave qu'il ne soit pas prêt se dit il. Il se secoua et entra avant d'être en retard.

Il était habillé à l'occidentale avec une chemise noire et un jean noir également. Il portait le collier et le bracelet dont il ne se séparait jamais, en fait il était exactement comme d'habitude. Pour éviter de porter un sac qu'il ne saurait pas où mettre il avait fourré dans ses poches tout ce dont il avait besoins: ses clefs, son paquet de clope avec un briquet dedans, un carnet dans lequel était déjà noté pas mal de mots de vocabulaire qu'il avait appris depuis qu'il était arrivé et un crayon pour en noter d'autre et bien sur de l'argent pour ne pas être prit au dépourvu. On ne vient pas draguer un mec sans être prêt à lui offrir tout l'or du monde.

Il se laissa guider jusqu'à la pièce où son fantasme, dont il avait apprit qu'il s'appelait Seika Asano, était supposé l'attendre.

Liam reconnu tout de suite les yeux verts qui hantaient ses rêves, des yeux qui ressemblaient à des pierres précieuses.
Il essaya que ça ne se remarque pas mais son échelle de stress détendit tout de suite d'au moins trois degrés. En effet il n'avait pas put revoir le jeune homme avant ce rendez vous arrangé. Il s'était rendu compte que les geishas étaient vachement protégées et organisées et avait commencé à prendre conscience du monde où il mettait les pieds. Il n'avait put que décrire la personne qu'il voulait voir et espérer que le chef du l'okiya ait bien comprit de qui il parlait. Apparemment il n'y avait pas deux personnes dans le hanamachi à avoir de tels yeux, du moins Liam interpréta de cette façon le fait que Taki Matsuro ne se soit pas trompé.

Il trouva que la voix du maiko était comme celle d'un petit oiseau, cela fit instantanément sourire Liam qui extériorisait toujours facilement ses émotions. Quand il s'inclina, Liam s'inclina aussi, avec empressement comme s'il avait oublié de le faire avant, c'était sans doute d'ailleurs ce qu'il pensait car il n'était pas encore bien habitué aux usages du pays.

_ « Je suis Liam Van Rijn, je te remercie d'avoir accepté de passer cette soirée avec moi. … Dans le cas où tu n'aurais pas eu le choix j'espère que finalement tu ne verras plus cette soirée comme une corvée. J'ignore beaucoup les usages et la façon dont je dois me comporter avec une geisha donc sois indulgent avec moi pour ce soir s'il te plait. … Devons nous nous asseoir ? »

Liam commença à tirer sur son bracelet en métal, ce qu'il faisait à chaque fois qu'il était prit en défaut et les nombreuses petites cicatrices sur son poignet témoignaient que ça lui arrivait souvent ces derniers temps.

_ « Je souhaitais te rencontrer depuis longtemps » choisi il d'avouer sincèrement
« Je t'ai vu une fois où tu étais sorti avec une autre geisha, tu portais un kimono qui ressemblait à celui que tu portes ce soir, c'était les mêmes couleurs, est ce tes couleurs préférées ? Je ne sais pas jusqu'où j'ai le droit de poser des questions personnelles mais j'aimerais en savoir plus sur toi. »

Liam se laissa aller dans la contemplation du visage et du corps menu et élégant du jeune homme, le laissant décider si il voulait ou pas lui répondre. Ils avaient toute la soirée, ça ne servait à rien de se montrer si pressant et après avoir réussi à avouer la raison réelle de sa visite Liam se sentait le cœur plus léger. Il se disait qu'il n'avait plus rien à cacher, bien que ce ne soit pas tout à fait vrai.

Seika fut rassuré de voir que l'inconnu semblait être aussi mal à l'aise que lui. apparemment, lui aussi était inexpérimenté dans tout ce qui était geisha. Pourtant, il ne le montra pas, gardant ce masque impassible qu'il utilisait quand il ne savait pas s'il devait faire confiance ou pas.
Ce masque fut brisé lorsqu'il entendit le mot "choisi" dans la bouche du dénommé Liam. Un sourire ironique étira ses lèvres une fraction de seconde. Choisir ? Depuis quand il pouvait choisir ? Surtout pas maintenant avec Taki sur le dos. S'il avait pu, il aurait passé sa soirée sur le toit à dessiner le coucher de soleil. Mais en même temps, il avait choisi de venir dans cet okiya, il aurait très bien pu fugué. mais n'était ce pas un choix forcé finalement. Ses yeux pétillèrent lorsque l'homme se confondit en excuses pour son ignorance des usages. ca le faisait ressembler à un enfant maladroit.

Lentement, avec des gestes mesurés, Seika désigna le sol face à la table basse.

- Oui, je vous en prie, asseyez vous, c'est moi qui oublie les usages...je ne suis pas geisha réellement juste un meiko, j'ai moi même du mal à saisir le mot "convenance" ca m'étonne que vous vouliez me voir, ajouta-t-il dévoilant ses pensées de manière brute sans hypocrisie ni courtoisie ajoutée.

Et il s'installa à genoux devant la table, montrant l'exemple. Un service de thé était posé sur cette petite table. La suite des paroles de Liam éclaira un peu plus Seika. Apparemment il l'avait déjà vu dans la rue. c'était très possible, Sei ne comptait pas les fois où il avait voulu faire un tour et qu'un chien de garde de geisha était venu l'escorter. Seulement, lui ne se souvenait pas du tout du visage de cet homme. Il remarqua que celui ci tiraillait son bracelet et qu'il avait quelques marques à cause de cela. ses yeux s'y attardèrent quelques secondes, puis ils revinrent sur le visage de son interlocuteur.

- J'aime bien les couleurs sombres, répondit-il simplement ne sachant pas vraiment en quoi cela intéressait le client, le noir surtout, parce que ca ne se remarque pas. je ne sais pas si je suis autorisé à vous faire ce genre de confidences ou pas. Moi, ca ne me dérange pas que vous le sachiez...tant que ca ne sort pas de cette pièce, je pense que je n'aurai pas d'ennuis par la suite.

Il contempla un instant le service à thé, essayant de se rappeler des paroles de Taki, avant de relever les yeux:

- Désirez vous une tasse de thé ? s'enquit-il se forçant à vouvoyer et à être poli comme on le lui avez appris, alors que tout ce qu'il avait envie de faire c'était de poser des questions à tort e à travers car il était curieux d'en savoir plus sur cet homme.

Ses longs doigts fin se refermèrent sur l'anse de la théière. De là où ils étaient placés, ils ressentait très bien la chaleur du liquide brulant.

- Posez moi les questions que vous voulez, j'y répondrais autant qu'il soit possible. Mais en retour est ce que cela vous dérangerai de m'en dire un peu plu sur vous ?

Il tourna son regard sur le poignet de Liam:

- Vous avez des marques sur le poignet; ca ne vous fait pas mal .?

Liam se senti coupable quand Seika lui expliqua à demi mots qu'il pourrait avoir des ennuis s'il faisait un faux pas. Il était très bien placé pour comprendre le stress que ça peut être de débuter dans un travail. Seika n'était pas censé voir des clients seul pour l'instant, il ne devait pas se sentir prêt mais Liam l'avait mit dans cette situation en demandant expressément à le voir.

_ « Rien de ce que nous dirons ne sortira de cette pièce, je ne veux pas te causer d'ennuis. Demande moi ce que tu veux comme garantie, je te révélerais mes secrets, comme ça tu n'auras plus rien à craindre de moi.
Les coupures sur mon poignet ne sont pas graves, je suis résistant, ne t'inquiètes pas. Si tu le souhaite tu peux me tutoyer, c'est peut être difficile de me donner un âge à cause de mon physique étranger mais je ne dois avoir que deux ou trois ans de plus que toi, c'est inutile que tu me témoigne autant de respect quand nous sommes seuls, j'ai perdu l'habitude d'autant d'égards en plus.
J'ai dû apprendre à me contrôler autant que j'en suis capable presque tout le temps depuis que je travaille, entre nous laissons tomber ça, c'est ce que je souhaite. Si tu es d'accord avec ça. »

Liam c'était mis à parler plus bas comme si c'était une conversation secrète, ça rendait aussi sa voix plus rauque que quand il parlait fort.

Bien qu'il parle de relâchement Liam se contrôlait toujours pour ne pas poser sa mains sur celle de Seika. Le toucher serait choquant, on ne touche pas une geisha, c'était une des consignes qu'on lui avait donné avant de le laisser seul avec le maiko. Le jeune homme en serait sans doute effrayé ou écœuré, il pourrait voir ça comme un attouchement. Liam n'aurait jamais rien fait qu'il juge pervers avec une personne qui ne lui avait pas donné un consentement clair et libre, il n'aurait même pas eu envie d'une telle chose, le viol c'était pas son truc, son envie vis à vis de Seika s'arrêtait à ce qu'il considérait comme de la chaleur humaine, juste se tenir la main. L'embrasser sur la bouche c'était un fantasme mais ce n'était pas encore l'heure d'envisager de le réaliser.

Il se contentait de le regarder dans les yeux, ce qu'il n'avait pas le droit de faire quand il était dans le rôle de celui qui sert au salon de thé. Rien que ça lui donnait un sentiment d'intimité.

_ « Quand je trouverais un beau kimono noir en ville je l'achèterais pour toi. »

Liam avait dit cela à voix haute parce qu'il venait d'y penser, il se reprit tout de suite en réalisant que c'était de la drague pas fine, à la limite du rentre dedans.

_ « Pas que je veuille te forcer à me revoir hein !
Je dis n'importe quoi, parles moi plutôt, j'aime beaucoup ta voix. Est ce parce que tu aimes les kimonos que tu as voulu devenir une geisha ? Ça à l'air difficile, tu n'es plus vraiment libre, on m'a dit que les maikos devaient aller en cours dans une école pour apprendre la musique et la danse… C'est un peu difficile pour moi de comprendre la relation entre une geisha et ses clients, on n'a pas d'équivalent à ce que vous êtes dans mon pays. Je suppose que tu aimes tout ça, la musique, les beaux vêtements et prendre le thé mais je trouve quand même que tu as du courage d'avoir choisi de vivre comme ça.
…
Tu dois te dire que tu es tombé sur un horrible bavard. Puisque c'est comme ça je vais savourer le thé que tu m'as offert, ainsi j'arriverais à garder le silence pendant pus de cinq minutes. »

Liam l'observa avec attention servir le thé comme il le faisait lui même au Hakuryu. Les mains de Seika avaient l'air douces et étaient fines et élégantes, à peine plus larges et anguleuses que celles d'une femme mais les articulations restaient fines. Il ne put s'empêcher de comparer avec les siennes qui non seulement étaient plus larges et plus noueuses mais par dessus le marcher parsemées de cicatrices, là une coupure, là une brulure récente faite avec l'eau bouillante du thé et une autre brulure, datant de plus d'un mois dû à un cordage qu'il n'avait pas voulu lâcher bien qu'il lui glissait des mains, sa ça se trouve cette marque là ne disparaitrait jamais complètement. Quelle misère comparée à l'adorable Seika.

Liam le remercia pour le thé et approcha la tasse de son visage pour en sentir le parfum, il était trop tôt encore pour le boire. S'il n'avait pas commencé à prendre l'habitude de manier les tasses de thé il s'en serait renversé dessus au commentaire de Seika. '' L'air innocent'' ? C'est l'hôpital qui se fout de la charité non ? Peut être Seika voulait il dire qu'il ignorait des choses qu'il aurait dû savoir pour son âge ?

_ « Eh bien c'est que je suis arrivé ici encore récemment et personne ne m'a vraiment expliqué … je découvre petit à petit euh … et puis je suis pas un vieux sage … Tu me trouves trop immature pour mes 18 ans ? Peut être que je ne suis pas encore vraiment un adulte mais, toi non plus n'est ce pas ? »

* '' concessions '' '' choix raisonnable '' en effet il est plus adulte que moi * pensa Liam. Puis il entendit '' décision paternelle '' et ses sourcils se froncèrent.

_ « Tu es la plus belle personne du hanamachi ! » répondit il sans hésiter.
« Je suppose qu'il n'y avait plus d'argent et que ça a bien arrangé ton père que tu sois capable de te débrouiller seul. C'est vraiment dégueulasse de t'avoir mit au pied du mur alors que tu n'es même pas encore en âge d'agir librement parmi les adultes. Pardonnes moi d'avoir présupposé que tu adorais la condition de geisha. … Pardon aussi de parler si durement de ton père, finalement je ne sais pas ce qu'il l'a poussé à te faire ça, sans doute qu'il l'a fait parce qu'il t'aime. » Bien qu'il essaye de minimiser ses propos en s'excusant Liam avait toujours l'air renfrogné et ni le ton de sa voix ni la ride entre ses sourcils n'avaient l'air de regretter d'avoir parlé durement.

Toutefois il commença à regretter quand il réalisa que Seika devait passer une des soirée les plus difficiles et désagréables de sa vie. Si ça se trouve c'était uniquement à cause de sa position ( qu'il n'aimait pas) qu'il s'était retenu de lui foutre son point dans la gueule quand il avait osé qualifier l'attitude de son père de ''dégueulasse''.
C'était un peu tard pour essayer de faire en sorte que Seika passe une bonne soirée mais Liam résolu d'essayer quand même de changer la situation. Il prit une voix plus douce pour proposer un arrangement:

_ « Si tu n'avais pas dû passer la soirée avec moi tu aurais voulu porter des vêtements plus confortables et dessiner, c'est ça ? Si ça te dis tu peux dessiner. Si tu veux je me tiendrais assez loin pour ne pas voir ce que tu dessines mais si tu veux bien que je te regarde faire ça me ferait très plaisir. »

Liam ferma son œil qui voyait encore et attendit avec une certaine anxiété la réponse de Seika. Il commençait à douter sérieusement qu'ils se revoient, à son sens si Seika rapportait qu'il avait eu des propos insultants vis à vis de sa famille le chef de l'okiya ne voudrait plus de lui comme client. Il n'avait pas eu besoins de lui révéler un quelconque secret pour que tous soit entre ses mains, son caractère trop explosif et si opposé au calme et à la retenu qu'on attendait au Japon suffisait à lui fermer toutes les portes.

Le jeune maiko le regardait avec un air de se dire '' mais qu'est ce que j'ai fait pour mériter d'avoir un imbécile pareil comme client''. Liam avait du mal à le regarder dans les yeux alors que d'habitude c'était plutôt naturel chez lui. Le jeune homme fini même par devoir le forcer à lui faire face. Liam en eu honte, il trouvait son attitude lâche.

Il écouta ce que disait Seika avec plus d'attention qu'il n'en avait jamais accordé à ses précepteurs successifs. Le plus important pour lui était de comprendre le jeune homme mais il remarqua aussi qu'il n'était pas d'accord avec tout ce qu'il disait.

_ « hum oui, je t'entends » balbutia Liam un peu troublé. Il se dit qu'il ferait mieux d'attendre de bien connaître Seika avant d'essayer de le convaincre qu'être adulte pouvait être autre chose. Il faudrait bien que quelqu'un réussisse à le lui faire voir avant qu'il ne soit lui même majeur sinon comment réagirait il à cet âge, ne risquait il pas de se détester lui même ? Mais l'échéance était assez lointaine, ce qui était bien plus grave c'était le peu d'importance qu'il semblait s'accorder. Sans aucun doute les adultes qui s'étaient occupés de lui avaient bien foiré leur rôle.
Nier en bloc, lui affirmer que Taki par exemple devait l'aimer à sa façon, ne serait pas crédible et ne lui ferait pas de bien. Liam avait pourtant envie de lui dire que lui allait l'aimer de toutes ses forces mais il se retient parce que là encore affirmer ça alors qu'ils venaient de se rencontrer ne serait pas crédible et serait le contraire d'un comportement adulte tel que le concevait Liam. Il résolu de se placer en adulte vis à vis de Seika et de le protéger de son mieux.

_ « Tu recommences à me vouvoyer ? Pourquoi ? Est ce une punition parce que je suis décevant ? … Je pense que tu n'as aucune raison de craindre de me blesser. Regarde, ne suis je pas plus grand et plus fort que toi, plus âgé aussi ? Ne suis je pas un client venu profiter de toi ? Je n'ai l'intention de te faire aucun mal bien sur … Je te l'ai dis et ce n'était pas un mensonge: ce qui se passe entre nous restera entre nous. Si tu commets une faute vis à vis d'un règlement quelconque je ne pourrais pas le savoir puisque je ne connais pas le règlement, tu ne cour donc aucun risque, tu n'as pas besoins d'être sage. Considère que je suis grand, tu n'as pas à me protéger ni me ménager et je ne suis pas un adulte, tu n'as pas à me respecter ni a me craindre, je ne te punirais pas, je ne suis pas quelqu'un digne de le faire. Quand à l'éventualité que j'en ressorte blessé, je prends le risque. Je suis venu ici pour te rencontrer, ce que je désire le plus c'est rencontrer le vrai Seika. …
Et c'est vrai que j'aimerais beaucoup voir tes dessins et te voir dessiner mais c'est uniquement si tu veux bien faire ça avec moi. Tu peux proposer des choses toi aussi, si tu veux aller quelque par je t'y amènerais. »

Son discours semblait ébranler Liam au plus haut point. Seika se mordit la bout de la langue, se rendant compte de son erreur, et devint bientôt agacé par sa propre initiative. Il avait fait une énorme bourde. Il s'était montré trop franc en lui exposant son point de vue des adultes. Il avait exposé sa force et sa faiblesse en même temps et il s'était mis en danger. C'était bel et bien une erreur de calcul grotesque. Comment avait il pu être si stupide ? Il aurait du être distant et calculateur face à cette inconnu, le regarder de haut, et non pas, impulsif et émotif comme il l'avait été si spontanément. Il était hors de question qu'un adulte ait du pouvoir sur lui. Cela il ne le supporterait pas. Ca le blesserait dans son amour propre. Surtout que cet homme restait un client. Il le disait lui même. Il ne devait le connaître que sous un angle purement professionnel, rien de plus. Il en rencontrerait probablement au fil de sa vie, des dizaines d'hommes, devait il à chaque fois leur montrer le vrai Seika ? Non cela était improbable. Le vrai Seika, personne ne le connaissait réellement, même sa famille ignorait une partie de sa personnalité. Celle qui se manifestait comme étant plutôt intelligente, mais d'une intelligence maligne, propre à donner une fausse image de lui, ou plutôt une image neutre, qu'on ne pouvait pas cerner du premier regard.

Il se releva de nouveau lorsque Liam eut finit son long discours, marchant le long de la pièce lentement et élégamment. Puis il se retourna vers lui, serrant les bras contre sa poitrine, la tête légèrement penchée, ce qui lui donnait l'air encore plus petit et fragile qu'il l'était déjà.

- Le vrai Seika ? fit-il calmement en sondant toujours son interlocuteur, mais Liam c'est impossible. Je ne vous vouvoie pas parce que vous êtes décevant, mais pour que vous compreniez bien quelque chose. Ici, les clients ne s'attendent pas à rencontrer de vraies personnes seulement des personnes auxquelles ils s'attendent de voir, c'est différent. Tant que vous serez mon client, et que nous serons ici, ce statut ne pourra changer. Emmenez moi loin d'ici si vous voulez, emmenez moi voir la mer, loin de cet okiya et là peut être que je pourrai vraiment être moi.

Seika disait la vérité. Il espérait que Liam se découragerait et accepterait une relation client-geisha normale sans plus ni moins. Pourtant il ne peut s'empêcher d'ajouter un peu rêveur à l'idée que cet homme pouvait le faire quitter l'okiya rien que quelques heures.

- Et je dessinerai. j'ai toujours rêvé de voir la mer pour la dessiner, avoua-t-il doucement.

Regrettant ce nouveau moment de spontanéité, qui lui échappait juste parce que son interlocuteur semblait trop jeune pour être un adulte et en même temps avait atteint l'âge légal pour l'être, il acheva avec un nouveau sourire retrouvant les convenances:

- Mais si nous restons dans l'okiya, rien ne nous empêche de passer une excellente soirée, n'est ce pas ? Le Seika de l'okiya vaut bien le vrai, d'une certaine manière.

Aucun doute, Liam avait le don de semer le doute dans l’esprit de Seika et d’embrouiller complètement ses réflexions. L’adolescent avait été persuadé que sa proposition d’aller voir la mer allait rebuter cet enfant-adulte (il n’avait pas encore réussi à le mettre dans une case précise et encore moins à cet instant). C’était son but au départ. Demander la mer pour que l’homme dévoile ses véritables intentions. un autre client n’aurait normalement pas pris la peine d’accepter cette proposition. Après tout, il avait payé pour être là, pour passer du bon temps et il se retrouvait nez à nez avec une personne qui faisait des caprices. Aucun doute qu’un autre que Liam aurait pris depuis longtemps la fuite.
Les yeux de Seika exprimait son complet désarçonnement quelques secondes, puis il reprit son expression calme et détachée. Hors de question que l’autre gagne ce soir. Il n’aurait que le Seika officiel pour l’instant. S’il devenait plus gentil et aimable d’un coup, cela aurait signifié qu’il était versatile et facilement achetable. Et il ne le voulait surtout pas. Il n’était pas ce genre de personne. Et puis ca se trouvait c’était une ruse d’adulte de lui faire plaisir ? Peut être qu’il était en train de se faire avoir complètement après tout. Seika décida de jouer la carte de la prudence et de continuer à l’observer pour être sur de ne pas se faire pièger.

*pourquoi est ce que je complique tout ainsi* pensa-t-il.

Mais la réponse il la connaissait très bien. il avait très peur de se faire trahir. Une fois suffisait amplement et cela faisait assez mal comme ca. Surtout par son propre père. Mais il était trop fier pour considérer cela comme de la peur. il n’aimait pas ce mot. Pour lui il n’avait peur de rien, alors que c’était loin d’être le cas.
Et c’est pour se prouver qu’il n’avait pas à craindre cet homme qu’il revint vers lui toujours en contrôlant ses pas, pour se réinstaller en face de lui .

- Je t’attendrai demain matin dans ce cas, fit-il simplement.

*tiens ta promesse* ajouta-t-il intérieurement.

Au fond de lui, il était très impatient content d’aller voir la mer, et l’idée du bateau lui plaisait réellement c’est pour cela qu’il laissa ses lèvres esquisser un petit sourire timide. Mais il ne pouvait cacher qu’en partie les sentiments qu’il ressentait et qui se reflétaient dans ses yeux. En dehors de l’appartement de ses parents, des rues, des toits, de l’okiya et de l’école, il ne connaissait pas grand-chose au monde extérieur et il avait hâte de découvrir ca. Et comme son regard était plongé dans celui de Liam, aucun doute que celui-ci pouvait le mettre à jour s’il l’observait bien.

- T..Tu veux me servir du thé ? répéta Seika incrédule par la proposition du jeune homme.

Cela avait toujours été le rôle du geisha, et cela le surprenait vraiment qu’un client propose cela. Il le dévisagea curieusement, puis cette fois ci il fit un franc et beau sourire car il trouvait cela très amusant cette façon de se comporter, et en même temps, cela lui donnait l’impression d’être plus avec quelqu’un n de proche qu’un simple client. Il se demandait si ce n’était pas une erreur de se comporter ainsi , mais c’était trop tard.

- Je te le permets Liam, fit-il sur un ton souverain mais le rire qui planait sur ses lèvres montrait qu’il n’avait nullement envie de s’imposer et de se montrer supérieur.

Liam guettait les moindres prémices d'une réponse, Seika avait l'air hésitant. Les doutes montèrent à l'assaut de Liam aussi, peut être avait il sous-estimé le poids des obligations de maiko de Seika, peut être qu'il ne pouvait pas prendre seul la décision d'aller à la mer avec un client, peut être qu'il devait aller à l'école demain, peut être que l'idée du bateau était de trop, Seika avait peut être peur de se retrouver sur un lieu clos comme un bateau avec lui.
Néanmoins Liam ne posa aucune de ces questions. Dire quelque chose comme '' si tu ne peux pas je comprendrais '' serait suicidaire puisqu'il attendait la réponse avec autant d'impatience qu'un gamin attend que ses parents statuent sur l'acceptation ou non d'un cadeau de noël très cher.

En entendant la réponse Liam soupira et ferma l'œil un instant en souriant béatement.
Il avait le sentiment d'avoir gagné une bataille décisive. Même si la journée à la mer n'était pas une réussite et qu'ils se disputaient ils auraient tissé un début de relation. Ce serait suffisant pour que dans tous les cas Liam trouve une excuse pour le revoir, et une autre et encore une autre. Bien sûr le sentiments de victoire fut très bref, Liam n'avait pas fini d'analyser qu'il se mettait déjà la pression pour que ça se passe bien. Il avait imaginé cette journée certain de trouver un bateau … euh d'ici demain matin il avait intérêt de se bouger le cul ! Il réfléchi aux possibilités: il pouvait tenter au culo de demander à un pêcheur de lui prêter le siens en allant au port très tôt avant de venir chercher Seika … ou il pouvait aller très tard ce soir après l'avoir quitté déranger un loueur de bateau de plaisance et payer la réservation … Le bateau de pêche c'est plus bohème et sa correspond à ce qu'il a l'habitude de naviguer, le bateau de location c'est plus sûr pour une journée sans imprévu. Paniqué, Liam décida de faire les deux au cas où Seika ne soit pas d'accord sur le côté bohème d'un bateau de pêche. Il ne put se détendre vraiment qu'après avoir arrêté sa décision et il se laissa encore emporter dans la contemplation des yeux émeraudes.

Seika avait l'air heureux de leur rendez vous pour la mer, sans doute qu'il attendait quelque chose d'exceptionnel. Liam se demanda s'il avait l'habitude d'assister à des grandes réceptions et somptueux banquets dans le cadre de son travail. Si c'était le cas est ce qu'il ne serait pas déçu par une simple promenade sur un petit bateau ? Liam posa une main sur son ventre en se disant que de toute façon il allait stresser jusqu'aux premiers signes d'amusement de Seika demain. Il se força à lui sourire pour cacher son stress en se retenant in extrémis de recommencer à torturer son poignet avec son bracelet metallique.

Finalement Seika relâcha sa tension en lui permettant de servir le thé. L'inaction avait toujours un effet négatif sur Liam. Avoir le thé à servir lui permit d'oublier qu'il se retenait de tirer sur son bracelet. La voix de Seika montrait qu'il trouvait l'idée très amusante, peut être qu'il s'attendait à ce que Liam fasse une gaffe.

Content de lui montrer qu'on pouvait compter sur lui Liam les servit avec l'aisance acquise dans son travail au salon de thé. Mais pour ne pas décevoir Seika et que la soirée continue sur le ton de l'amusement Liam eu envie de lui avouer la vérité.

_ « Quand j'étais encore en Hollande je regardais souvent des lithographies japonaises que mon frère et ma mère faisaient importer, tout ce que je savais de votre culture je l'ai appris comme ça. La première fois que j'ai servit le thé avec un service à thé japonais je m'étais mis en tête de ressembler à une de ces geishas qui servent le thé avec des gestes très élégants en mettant en valeur les manches très longues de leurs kimonos, le résulta c'est que j'ai oublié l'essentiel et j'ai tellement remplie la tasse qu'il était impossible de la boire. Heureusement pour moi que les japonais que j'ai rencontré sont très gentils, comme toi, on ne m'a jamais grondé pour mes bêtises depuis que j'ai débarqué. »

Liam se dit que ce qu'il racontait n'avait pas un grand intérêt mais il pensait qu'en commençant à se confier à Seika il pourrait l'amener à lui faire davantage confiance et peut être à se confier lui aussi.

« Depuis que je suis arrivé ici je dois beaucoup à la gentillesse des japonais. Tant de choses sont si différentes, je me retrouve capable de mordre à n'importe quel mensonge ou même aux histoires des légendes, comme un enfant. … Je prends des risques à te dire ça moi, j'espère que tu ne vas pas en abuser pour me jouer des tours ! … Pour demain, s'il te plait, habilles toi comme tu aimes. Le kimono te va vraiment très bien mais j'aimerais savoir ce que tu aimes. »

En servant le thé ses mains passèrent tout près de celles de Seika, ça le démangeait de tendre le bras de dix centimètres pour attraper la main du jeune maiko et la garder dans la sienne … mais il ne fallait pas. Il ne fallait pas tomber amoureux d'une geisha, il savait qu'il était en trains de faire une belle connerie et de se préparer à bien souffrir mais pourtant avoir sa main à dix centimètres de celle si parfaite de Seika suffisait à le faire planer. Liam se sentait un peu coupable du caractère très charnel de son attirance pour le jeune homme. Il était sincère avec lui même: si il n'avait pas été beau il ne se serait pas intéressé à Seika au départ, il le savait.
C'est étrange quand même de savoir qu'on ne connaît pas assez une personne pour l'aimer, de savoir qu'aimer cette personne va nous conduire à un désastre sentimental et malgré tout d'être parfaitement heureux d'être là, près de cette personne. Un délicieux mélange d'excitation physique et d'excitation de l'aventure de cette histoire sentimentale vouée à être périlleuse.

Seika laissa Liam lui servir du thé, attentif à chacun de ses gestes. Il ne comprenait pas vraiment pourquoi Liam parlait librement avec lui ,sans craindre que cela puisse se retourner contre lui. Dévoiler son passé ou ses pensées s'avérait dangereux, cela donnait du pouvoir à celui qui écoutait. la seule explication possible était que Liam lui faisait confiance. est ce que cela sous entendait que Sei devait faire la me chose ? Il choisit de ne pas répondre à cette question tout de suite.
La remarque de Liam sur sa maladresse lui tira un petit sourire.

- tu te débrouilles bien maintenant, remarqua-t-il il te manque juste une petite chose pour faire une parfaite geisha en servant le thé. mais c'est normal puisque personne ne t'a appris et que tu ne portes pas la tenue.


Il reprit l'anse de la théière, l'approcha de la tasse de Liam faisant mine de le servir, mais inclina le bras de telle façon que le pan de sa manche dévoile la chair de son poignet , jusque là dissimulée. puis il reposa sa théière et sa manche recouvrit son poignet de nouveau.

- Je ne sais pas vraiment pourquoi on nous apprend cela. Peut être que les clients apprécient.

Il pencha la tête sur le coté. cette question le tracassait vraiment. Seika n'avait jamais saisir la raison de tout ce qu'on lui apprenait à l'okiya. l'amour, l'affection, l'attirance, toutes ces chansons qu'il avait rejeté afin de se sentir plus libre, restaient un mystère pour lui. il avait encore beaucoup de chose à apprendre, le problème c'était que les geishas ne lui apprenaient pas les choses de la bonne manière. Ce qu'il lui fallait c'était de se libérer de cet handicap sentimental et non pas de lui imposer une manière d'agir susceptible de s'attirer les faveurs d'autrui.

- Tu es plus adulte que moi, continua Sei, peut être que tu comprends mieux le pourquoi de ce geste.

Liam faisait vraiment preuve de beaucoup trop de gentillesse envers lui, comme s'i lvoulait à tout pris que Sei soit heureux. Sei se demandait ce qu'il attendait vraiment de lui, et surtout s'il était en mesure de pouvoir lui donner;

- Je trouve ca normal que tu ignores , certaines chose des coutumes du Japon. et je ne te jouerai pas de tour promis. moi même si j'allais dans ton pays, je ne me sentirais pas du tout à l 'aise. A quoi ressemble la Hollande ? Est ce réellement si différent d'ici ? Existe il des geishas là bas ou quelque chose qui ressemble ?

Seika était vraiment curieux d'en apprendre sur ce pays inconnu.

- fais juste attention de ne pas te faire prendre à certaines farces ici. Surtout si tu rencontres d'autres maiko que moi (il pensa à Meri). Les enfants aiment s'amuser, certains parfois au détriment des autres. car contrairement aux adultes les enfants n'ont pas de limite. alors ca pourrait être blessant.

Malgré lui, Seika avait énoncé un conseil. ce n'était pas l'attitude d'une geisha envers un client. Mais il avait un peu perdu de vue cette situation, comme Liam se comportait plus comme un connaissance qu'un véritable client. Le jeune homme se demandait ce qui pouvait aider Liam à connaitre un peu mieux la culture japonaise, car il savait que c'était toujours désagréable de recevoir des moqueries dues à son ignorance.

- Légendes...répéta-t-il à voix basse, reprenant le terme de Liam.
Il porta sa tassa à ses lèvres pour en boire une gorgé lentement. Il eut subitement une idée.

- Est ce que tu aimes les histoires ? demanda-t-il en fixant le jeune homme dans les yeux. Je peux t'en raconter une que je connais bien je ne pense pas qu'il y en ait équivalent dans ton pays...Je la racontais souvent à ma soeur, elle avait une peur bleue à chaque fois !!

Seika laissa échapper un léger rie cristallin. les contes était un reflet de l'imagination populaire. Pourquoi les racontait on si elles n'apprenaient pas quelque chose ?

_ « Les clients apprécient. » lui confirma Liam « Cette partie de toi est vraiment … sensuelle. La peaux est si fine, ça donne envie de l'embrasser. »
On voyait aux joues roses de Liam qu'il savait bien de quoi il parlait. En réalité il voyait bien plus dans ce geste et il pensait bien ne pas être le seul à faire le lien entre le fait de dévoiler l'intérieur de son poignet et l'intérieur de ses cuisses mais il n'avouerait pas ça à Seika, d'une part parce que rien ne lui prouvait qu'il n'était pas le seul et d'autre part parce qu'il ne serait pas capable d'aller jusqu'au bout de son explication sans rougir jusqu'à l'auto combustion spontanée.

« La principale différence en Hollande [ l'art de changer de sujet ] c'est qu'il fait vraiment plus froid, j'avais l'impression de me rapprocher sans cesse de l'enfer en descendant dans le sud mais finalement je m'y habitue donc je suppose que si tu venais en Hollande tu souffrirais du froid le premier hiver mais finalement ça irait … il y a des compensations, les grandes étendues de neiges sont magnifiques. En général on dit que c'est apaisant, le matin quand personne n'a encore marché dedans ça à l'air pur … hum mais en fait moi ça me donne juste envie de courir dedans pour tout foutre en l'air. » Liam dit ça en retenant un éclat de rire assez révélateur de son côté sale gosse.

« ... En été il y a les champs de fleurs... c'est toujours tout plat en Hollande, on n'a aucune montagnes comme le mont Fuji, je comprends qu'il ait été autant dessiné, il est impressionnant. … La plage aussi est différente, surtout la baie de Tokyo, quand je l'ai vu c'était surnaturel, futuriste un peu, on dirait que la ville sort de la mer, la frontière entre les deux est floue. Dans mon pays ça ne peut pas exister car nous sommes en dessous du niveau de la mer. Les seules constructions proches des plages sont les digues. C'est beaucoup plus sauvage, ici même si on va vers Kamakura c'est moins naturel comme paysage. J'aimerais t'amener chez moi un jour, je suis sure que tu verrais pleins de choses que tu aimerais dessiner. En attendant je t'amènerais voir la plage de Kamakura demain, c'est vraiment chouette, tu verras.
Par contre on n'a rien qui ressemble aux Geishas … ce qu'il y a de plus proche d'une geisha chez moi c'est sans doute mon frère ! » Liam rit de sa propre remarque mais son rire s'éteignit dans sa gorge. « On s'envoie toujours des vacheries mais en fait il me manque... C'est un passionné du Japon, c'est à cause de lui que j'ai eu envie de venir. »
Liam s'arrêta de parler un peu brusquement comme si quelque chose lui avait coupé la parole. Il fut sur le point de commencer une phrase plusieurs fois sans y parvenir, petit à petit il passait d'un air surprit [ en fait c'est de comprendre la porté de ce qu'il vient de dire qui le surprend ] à un air tout triste.

« Pardon Seika. Je pensais pas du tout … ce que j'ai dis mais je voulais pas dire ça. Toi c'est différent, tu es vraiment une geisha donc ça n'a rien dont on puisse se moquer ! Je parle toujours sans réfléchir. L'attitude de mon frère n'a rien à voir avec vous ici. Je suis désolé si c'était blessant. … Je crois que je suis pire que les gosses qu'on pas de limites. C'est vrai qu'en pensant aux tours que j'ai moi même joué quand j'étais gamin et aux conneries que j'arrête pas d'accumuler malgré moi je serais indéfendable si je me trouvais dans le rôle de la victime pour une fois. … … Tu veux toujours bien me raconter l'histoire ? Si te plait. » L'expression de Liam était entre une moue et un sourire, ça se voulait sans doute mignon pour se faire pardonner. « S'il te plait ne m'en veut pas. Je manque souvent de tact mais … j'ai tellement envie de te protéger … de tout faire pour toi … » Contrairement à son habitude Liam disait cela d'une voix basse qui devenait de plus en plus un murmure, il tendit la mains vers le visage de Seika, ses doigts éfleurèrent juste sa joue avant de retomber sagement sur les genoux de Liam comme si de rien.

Seika considéra avec curiosité Liam lorsque celui ci se mit à rougir en parlant de son poignet. Personnellement, il ne comprenait pas encore ce qu'était l'attrait physique, ou plutôt il n'avait toujours réprimé chez lui, considérant que c'était trop "adulte". Comme quoi se mentir pouvait être rassurant de temps en temps. Mais il trouvait vraiment amusant - et flatteur aussi il fallait l'avouer, son ego était touchée- que Liam puisse avoir l'envie de l'embrasser. Ca lui donnait l'impression d'être un peu plus libre que Liam, puisque lui n'avait conscience d'aucun besoin d'être proche de quelqu'un, de quelque manière qu'il soit. Un demi sourire étira ses lèvres, et il écouta la suite des paroles du jeune homme, sans cesser de l'étudier, amusé. Liam décrivait très bien son pays, et il avait ce côté gamin que Seika appréciait plutôt. Son sourire s'agrandit de quelques centimètres lors de sa boutade sur la neige. Plus il écoutait, plus il avait envie d'en apprendre plus sur ce pays. Et surtout le voir. Ses yeux brilèrent à l'évocation du mont Fuji. C'était son rêve depuis tellement longtemps. Dessiner cette montagne sacrée. c'était son véritable but secret, une sorte de rêve qu'il doutait de pouvoir réaliser un jour puisqu'il était pieds et mains liés dans cet okiya de malheur.

- tu n'as pas à t'excuser, fit-il en regardant Liam bien en face de plus en plus amusé par son torrent d'excuses, je ne me vexe pas pour si peu.

Seika parlait toujours calmement, presque neutre et détaché, alors qu'en réalité, il avait vraiment envie de rire. Que Liam soit aussi gêné. et dire que ca aurait du être le contraire, que lui en tant que maiko aurait du être sans ses petits souliers pour sa première rencontre avec un client !
Son amusement fut vite remplacé par du pur sérieux; lorsque Liam lui murmura " j'ai tellement envie de te protéger … de tout faire pour toi … ". L'adolescent cilla légèrement, ébranlé par cette phrase. Personne n'avait jamais manifesté l'envie de prendre soin de lui de quelque manière qu'il soit. Il s'était toujours débrouillé seul ,et ca avait été plutôt lui qui veillait sur sa famille et protéger ses frères et ses soeurs en cas de conflits. Il fixa Liam éberlué. Il ne comprenait pas pourquoi un inconnu pouvait ressentir cela pour lui. Mais il sentait que c'était dangereux. Pour lui. Car l'autre était vraiment habile pour essayer de détruire la coque protectrice qu'il s'était formée depuis des années. Il se raidit lorsque Liam lui effleura la joue mais il ne bougea pas d'un pouce. Figé comme une poupée de porcelaine, avec une pointe d'incertitude dans les yeux. Puis il reprit vie lorsqu'il s'agit de raconter son histoire.

- Bien sur que je veux toujours te la raconter. Mais il faut se mettre dans l'ambiance sinon, elle a moins d'effet.

Il se leva et alla chercher rapidement des bougies et des allumettes dans le placard qu'il entreposa sur la table avant de les allumer. Puis il éteignit la lumière avant de revenir à sa place.

- Comme ca c'est mieux, approuva-t-il en regardant la visage de Liam sur lequel les flammes des bougies déposaient des tâches de lumière orange.

Il s'interrompit un instant pour rassembler ses pensées puis commenca, la voix douce et feutrée :

- Cette légende date d'une centaine d'années. On raconte qu'un homme vivait seul près des monts Okuchichibu dans une petite maison qu'il avait lui même construite. De là où il vivait un long chemin menait à la ville, et contournait la chaîne de montagne. Il devait l'emprunter pour rentrer chez lui, et comme ce chemin était long et qu'il lui fallait énormément de temps pour gagner les commerces, il préférait le plus souvent traverser le mont pour accéder plus rapidement à la ville. Il ne sortait que rarement de chez lui, mais quelque fois il allait chez des amis pour boire un verre après une journée de travail. Cependant, il veillait à ne pas rester en ville lorsque la nuit tombée. Car les gens de la ville racontait qu'un fantôme errait par les montagnes, et que quiconque osait les franchir après minuit ne revenait jamais. Mais un jour, il resta un peu plus longtemps chez un ami, l'alcool aidant, et à minuit il se trouva face à un dilemne : devait-il emprunter le long chemin ou couper court à travers les montagnes. La fatigue et le froid pesaient sur ses épaules, et comme il n'avait rien de superstitieux, il décida de balayer cette légende et de passer tout de même par les monts. C'est ce qu'il fit.
Il se mit à gravier la montagne, passant par un petit sentier étroit. il marchait marchait marchait sans relâche; jusqu'à ce qu'il apercoive une petite source en contrabas, qu'il n'avait jamais remarqué auparavant. L'eau coulait, cristalline et produisait de petits sons chantants, comme un rire de jeune fille. Il s'arrêta pour la contempler, surpris de ne jamais l'avoir découvert auparavant. Un nuage maqua la lune à cet instant précis et lorsque la clarté de la lune réapparut, il tourna la tête et....Aaaaaaaaaaah !!

Seika s'était penché plus près vers Liam, il laissa flotter quelques secondes de silence avant de continuer.

- Une femme se tenait près de lui, vêtue d'un long kimono de soie, aux reflets bleutés. Ses longs cheveux noirs étaient relâchés sur ses épaules. Elle était très belle mais..

Nouvelle pause

- Mais elle n'avait pas de visage. Aucun trait sur sa figure, juste une face blanche, réflétant l'éclat de la lune. L'homme ne pouvait détacher son regard de la femme sans visage qui tendit ses mains vers lui, comme pour l'étreindre. Le lendemain matin, on retrouva l'homme sur le petit sentier étroit, son écharpe bien serré autour de son cou.

Seika sourit, et amena ses mains autour de son propre cou, faisant mine de s'étrangler, tout en observant l'expression de Liam, voulant savoir si son histoire avait fait de l'effet. Puis brusquement, il souffla les bougies.

Liam soupira se soulagement en souriant.

_ « C'est cool, ça me rassure que tu sois pas susceptible, je suis incapable de tourner sept fois ma langue dans ma bouche avant de parler. Si des fois je rie à tes dépends tu peux me renvoyer l'ascenseur, il faut pas prendre de gants. »


Liam était trop ému lui même pour se rendre compte que si Seika c'était raidit à son contact c'était parce qu'il était loin d'apprécier. Il remarqua quand même qu'il n'aurait pas dû le faire, Seika avait l'air de ne pas trouver ça convenable et c'est vrai que ça ne l'était pas: les clients ne sont pas censés toucher les geishas. Liam se fit la remarque qu'il continuait décidément de braver tous les interdit et qu'il allait bientôt avoir la même réputation de voyou ici que dans son pays.

Il craignit que Seika ne se lève pour remettre une distance convenable entre eux mais fut aussitôt rassuré de voir qu'il installait simplement un décor plus propice à une histoire horrible. Liam adorait ce genre de jeux, il le regardait allumer les bougies avec une lueur espiègle dans le regard..

Il écoutait attentivement en admirant aussi les reflets des bougies dans les yeux du maiko.

D'un seul coup Seika poussa un cri et Liam l'attrapa dans ses bras pour le serrer contre lui instinctivement mais il se reprit à temps et le laissa reprendre sa place pour continuer son histoire.

A la fin Liam ricana en souriant , puis il jeta un bref coup d'œil derrière lui comme s'il craignait qu'on l'attaque par derrière pour l'étrangler.

_ « Eééh » fit il quand Seika souffla les bougies. Ils se retrouvaient dans le noir complet, dehors il faisait nuit depuis un moment.

Habitué aux farces des ces anciens amis, Liam sécurisa la situation en attrapant assez fermement Seika par le poignet. Il n'avait aucune autre arrière pensée que de s'assurer de savoir où il était et qu'il ne profite pas de la pénombre pour se jouer de lui d'une quelconque façon.

Ses yeux ( plutôt son œil en fait, mais c'est morbide au singulier ) allaient mettre un peu de temps à s'habituer à la pénombre car il avait fixé les points éclairés par les flammes des bougies pendant que Seika racontait l'histoire.
Il passa de l'autre coté de la table pour se retrouver du même côté que Seika. Il pensa qu'il pourrait profiter de la situation pour embrasser ce poignet si désiré, il fut même sur le point de le faire, Seika du sentir son souffle chaud contre sa peaux, suivit du son reconnaissable d'un sourire qui se dessine. Finalement Liam ne l'embrassa pas mais ne le lâcha pas non plus. Il vient s'agenouiller à côté de lui, quasiment collé.
Il avait agit ainsi pour garder le contrôle de la situation mais il ne savait absolument pas ce qu'il allait faire une fois près de lui. Il resta sans bouger quelques seconde, on pouvait sentir son hésitation, puis il le força plus ou moins à s'allonger et s'allongeât à côté de lui dans le même mouvement. Il était presque collé contre lui mais ne faisait toujours que lui tenir la mains.

_ « J'aimerais trop pouvoir m'endormir comme ça. »

Sitôt les bougies soufflées, Seika tendit la main pour attraper la boîte d’allumettes qu’il avait préalablement repéré avant d’éteindre les flammes. Il n’avait aucune idées malsaine en tête en faisant ce geste, hormis peut être de plonger Liam dans cette histoire effrayante jusqu’au bout, en les plongeant tous deux dans l’obscurité.
Eteindre puis rallumer les bougies était une bonne manière de rappeler l’épisode de la lune voilée.
mais il n’eut pas l’occasion d’atteindre la boîte, la main de Liam s’ étant refermée sur son poignet. Surpris, Sei se figea immédiatement, tout comme lorsque Liam l’avait serré contre lui l’instant précédent, quand il avait délibérément poussé un cri. La poigne de fer du jeune homme rappelait celle d’un étau, et dans l’obscurité ainsi, Seika commençait malgré lui à avoir peur. Parce qu’il perdait le contrôle de la situation et que ce n’était pas dans ses habitudes Les battements de son cœur s’accélérèrent lorsque Liam se plaça près de lui. ? Il pouvait sentir son souffle chaud sur son poignet et il ferma les yeux, s’attendant ce que la bouche de Liam s’y pose, l’estomac noué. Il était littéralement terrifiée par touts les marques de tendresse que l’on pouvait avoir envers lui.

*Non*

Comme si une divinité supérieure avait entendu sa supplication silencieuse, Liam se ravisa et Sei se mit à espérer qu’il le lâche. Mais il se senti au contraire attiré vers le sol. Il tenta de résister, mais Liam s’avérait bien trop fort pour lui. Il ne faisait pas le poids, alors il n’eut d’autre choix que de se laisser faire. A présent, il réalisait à quel point il était faible, et ca le dégoutait. Si cet homme voulait le forcer, il ne pouvait strictement rien faire ; cette perspective le glaça. il abhorrait se sentir impuissant. Et tout cela se mêlait de panique. Il tremblait. Pourtant Liam se contenta de se coucher près de lui.


- T.Tu vas me faire du mal ? réussit-il à articuler, la voix hachée.

Malgré ses efforts pour le cacher, son ton trahissait sa peur. Il voulait que Liam le lâche, il ne voulait pas qu’on le touche, personne, surtout pas Liam avec cette tendresse qu’il exprimait aussi bien par ses gestes que par ses paroles. Il ne voulait pas qu’on soit tendre avec lui. Finalement, ce tourbillon d’émotion se changea en colère :

- Je ne suis pas une poupée de chiffon qu’in câline et avec laquelle on dort, dit-il toute sa tension perceptible dans sa voix, je suis un garçon, c’est clair ? Je n’ai pas besoin de ca. Lâche moi tout de suite et laisse moi me relever !!!

Son corps était secoué de petits tremblement nerveux et il finit par s’écrier la voix cassée :

- je ne suis pas un jouet !

En lui tenant le poignet Liam pouvait sentir que Seika était tendu mais il espérait qu'il allait accepter qu'il lui tienne la main et qu'il allait se détendre mais au contraire Seika semblait que le qui vive, attendant une attaque que Liam n'avait pas l'intention d'entreprendre.

_ « Bien sur que non ! » s'écria t'il très vite et avec étonnement quand il lui demanda s'il allait lui faire du mal. ça le rendait triste que le jeune homme ait peur de lui, il se redressa sur le coude en s'éloignant d'une vingtaine de centimètres pour que Seika puisse voir que son geste tendre n'était pas le début des préliminaires, qu'il n'y avait pas de suite prévue.
Il pensait que Seika allait se calmer s'il s'éloignait un peu mais il comprit vite que ça n'allait pas suffire, il se fit envoyer au visage ses quatre vérités.

Liam écoutait en ponctuant le discours de petit ''hum !'' affirmatifs comme un enfant qui se fait faire la morale. Il ne discuta pas et le lâcha immédiatement quand Seika le lui ordonna. Il se rassit presque correctement à une distance plus raisonnable.
Il garda le silence un long moment en respirant profondément comme pour retrouver son calme ou pour contenir une émotion forte. Il se refusait à s'excuser une fois de plus, ça aurait été au moins la quatrième fois de la soirée et ça deviendrait irritant pour Seika et inutile. Pourtant s'excuser était la seule chose à laquelle il pouvait penser et c'est pour ça qu'il restait silencieux en attendant de trouver ce qu'il pourrait dire.

_ « Peut être que tu souhaites que je m'en aille pour ce soir ? … euh Q-quoi qu'il en soit je reviendrais demains te chercher si tu veux venir ! Je t'attendrais à l'entrée de l'okiya jusqu'à l'après midi où je devrais aller travailler. … Je suis venu ici en m'imaginant que je n'étais pas comme les autres clients parce que je t'aime mais j'étais présomptueux. Je suis juste venu voir une geisha parce que j'avais besoins d'un câlin, comme tous les autres. … Et en plus si c'était pour ça, si je suis incapable d'avoir des relations d'adultes raffinés, j'aurais mieux fait d'aller voir une pute, je savais dès le début que je ne devais pas te toucher ! Il semblerait que bien que je sois un garçon j'ai besoins de trop de câlineries, mon père et mon frère m'ont donné de mauvaises habitudes pour ça. » Liam essaya de rire mais ça ressemblait plutôt à un sanglot et il arrêta vite d'essayer.
Il s'en voulait de l'avoir mit dans cet état, il avait l'impression d'avoir la tête qui tourne.

Il se retrouvait encore dans le rôle de la grosse brute méchante. Il en avait l'habitude parce qu'il s'était souvent retrouvé à être plus fort que ses camarades de jeux du même âge et à être le brise tout de la bande, il ne comptait plus le nombre de fois où il avait blessé un de ses amis. Pourtant il ne voulait pas les faire pleurer ! La seule façon dont il savait gérer ces situations était de demander pardon en faisant un câlin à son ami pour le réconforter … mais s'il ne pouvait plus avoir recours à l'indulgence et à la tendresse, si comme on l'avait prévenu il ne pouvait plus se comporter comme un enfant … si c'était maintenant qu'il fallait être un adulte il n'était pas prêt du tout, il y pensait avec affolement.

En se déplaçant à quatre pattes Liam alla rejoindre sa place de l'autre côté de la table. Comme il se retenait de se jeter sur lui pour le serrer dans ses bras, en contrepartie il ne pouvait pas s'arrêter de parler, les mots coulaient comme pour remplacer des larmes qu'il ne voulait pas versées mais qui s'entendaient dans sa voix. Il se devait de trouver une solution, de vite comprendre comment agir.

_ « Seika, tu veux que j'aille chercher quelqu'un ? Tu as un ami ici avec qui tu préfèrerais être ? Dis moi si je dois partir tout de suite je- je peux pas te laisser comme ça euh sauf si vraiment c'est ce que tu veux, dis moi, n'importe quoi, je ferais n'importe quoi. J'ai dépassé les bornes, je sais, j'aurais jamais du … je suis désolé d'encore m'excuser, je suis désolé d'être connement désolé … Je voudrais te prendre dans mes bras, pas du tout comme une poupée mais pour que tu n'ai plus envie de pleurer mais je sais que c'est à cause de moi que tu souffres, je devrais me casser la gueule si j'étais logique avec moi même puisque c'est ce que je ferais à une personne qui te ferait souffrir. Les gens que j'aime pètent toujours les plombs à cause de moi et où que j'aille ça changera pas. »

Liam croisa les bras de façon à se prendre lui même dans ses bras, avec l'obscurité il était difficile de dire si il pleurait où pas. Des souvenirs qui n'avaient que peu de chose à voir avec la situation remontaient à la surface mais il ne savait pas vraiment si c'était pour tout ça qu'il se sentait mal ou juste pour Seika.

_ « C'est de ma faute, je désobéis toujours au moins une fois à toutes les choses comme si je ne pouvais pas faire confiance qu'il y ait une bonne raison pour laquelle c'est interdit. Mais là, j'ai vraiment compris, je ne te toucherais plus, je reste derrière la table: tu vois ? »

Il disait ça mais en fait il se penchait tellement au dessus de la table qu'il n'était pas loin de repasser de l'autre côté, il avait renversé la théière et ce qu'il restait de thé se rependait sur la nappe et gouttait sur le tatami mais il s'en foutait il voulait seulement entendre Seika lui dire que tout allait bien.

Au moment où Liam le lâcha, l’étau d’affolement qui enserrait la gorge de Seika commença à se relâcher petit à petit. Il se mit à respirer un peu plus librement. Certes le jeune hollandais avait prononcé des mots rassurants en lui disant qu’il ne lui ferait pas de mal, mais Sei n’avait pas confiance en les mots. Parce qu’on pouvait dire tout ce qu’on voulait mais agir tout à fait autrement. Et puis cette satanée obscurité l’empêchait de voir le visage de Liam donc il ne pouvait pas y lire la sincérité ou au contraire le mensonge.

*c’est ironique comme situation...je me piège tout seul en nous mettant dans le noir...et je fais une crise d’angoisse tout seul...j’aurais du réfléchir avant...baka *

Un sourire amer que personne ne pouvait voir étira ses lèvres. Si Sei restait très exigeant envers les autres, il l’était dix fois plus avec lui-même. Il ne pouvait pas vraiment en vouloir à Liam, car le seul responsable, c’était lui. S’il n’avait pas soufflé les bougies, il n’y aurait pas eu cette scène...quoique..il ne savait pas vraiment parce que Liam semblait avoir un caractère réellement impulsif.
Il se redressa, et se rassit, essayant de calmer son esprit qui partait dans tous les sens : d’une part l’oppression du noir qui l’entourait, de l’autre les paroles ininterrompues de Liam et de l’autre son propre jugement. Car il ne savait plus quoi penser en cet instant face à la réaction du jeune homme. Car ses gestes ne semblaient avoir aucun lien avec ce qu’il ressentait apparemment et cela lui donnait un air maladroit. Et il était incapable de parler tout simplement parce qu’il savait qu’il ne contrôlerait pas ce qu’il dirait.

Plus Seika l’écoutait, plus il percevait un drôle de son dans sa voix, comme s’il était sur le point de pleurer...l’adolescent n’en revenait pas. Et puis certains mots de Liam le prenaient au dépourvu.

*relations d'adultes ? présomptueux ? pute ? parce que je t’aime ?*

Il essayait d’interpréter tout ça, mais il ne savait pas s’il devait encore plus se fâcher car il avait l’impression que Liam le comparait à un adulte, ou alors s’attendrir parce qu’il semblait vraiment malheureux, ou encore mettre les choses au clair sur cette histoire de « je t’aime ».
Parce que pour Seika, Liam venait d’énoncer une énormité.

*comment peut il juste penser à ce mot « aimer » ? Il me connaît à peine*

Contrairement à sa sœur, il n’avait jamais eu d’intérêt aux histoires à l’eau de rose, et le « coup de foudre » pour lui n’évoquait pas grand-chose.
Finalement, il prit sa décision. Il respira profondément à plusieurs reprises pour reprendre contenance. Quand il sentit que Liam se penchait vers lui, il ne bougea pas. Il comprenait qu’il n’avait rien à craindre de lui...mais en plus, il se rendait compte qu’il l’avait blessé. Et cela l’étonnait encore plus.

- Je suis en train de te rendre malheureux, pas vrai ? demanda-t-il doucement tandis que ses doigts effleuraient le liquide chaud qui se déversait sur le sol. Tu me parles de plein de choses que je ne connais pas du tout....et je réagis mal parce que je ne comprends pas. mais tu n’as pas à être désolé ainsi...j’ai juste paniqué pour pas grand-chose, je crois que mon histoire d’horreur m’a fait beaucoup plus d’effet qu’à toi, plaisanta-t-il pour alléger l’atmosphère. Je ne crois pas que ca soit si mal que ca de désobéir aux règles de temps en temps...je le fais très souvent alors je ne peux pas te le reprocher. Peut être qu’il faut juste veiller de faire ca au bon moment.

Il s’interrompit un instant. Il doutait un peu de lui. Peut être qu’il s’enlisait et qu’il n’améliorait en rien la situation et qu’il creusait encore plus l’écart entre lui et Liam...le mieux serait peut être qu’il mette ses idées au clair cette nuit, et prendre un peu plus de recul sur cette situation.

- Tu devrais rentrer chez toi. Demain, il faudra que tu te lèves tôt si nous allons à la plage. Il faut que tu sois en pleine forme.

Une manière simple de dire qu’il ne lui en tenait pas rigueur de son comportement, que c’était pardonné et qu’il voulait bien le revoir

Liam commença a être rassurer quand Seika se releva mais il ne se calma vraiment que quand il l'entendit parler.
Sa voix était calme et posée, sérieuse, elle su bloquer la montée de panique de Liam qui commençait à faire n'importe quoi mais n'arrivait plus à s'arrêter.

« Faire ça au bon moment » répéta Liam en agitant la tête pour dire « oui oui »

_ « Oui, oui » continua t'il de faire. Il devrait laisser Seika dormir, aller préparer la journée de demain pour que tout soit parfait et rentrer dormir quelques heures lui aussi. Heureusement qu'un cycle de sommeil de quatre heures lui suffisait pour avoir ''trop d'énergie''. Il se dit que c'était bien qu'il ait toujours une chambre réservée à l'hôtel, il se voyait mal rentrer chez son patron en plein milieu de la nuit d'autant plus dans cet état d'excitation. Il était tellement heureux que Seika accepte de sortir avec lui le lendemain qu'il ne savait pas s'il allait réussir à s'endormir.

« Bien sur que nous irons à la plage ! Je serais là quand tu te réveilleras, tu peux avoir confiance en moi. Je suis toujours levé avant les gens en général, si tu te lèves vers sept heure trente j'aurais grandement eu le temps d'arriver. On partira quand tu voudras, lèves toi quand tu le sens, je t'attendrai … j'ai plutôt tendance à être un peu trop en forme. Je vais éponger tout ça avant de partir, il est pas question que je te laisses le faire. Je veux surtout pas que tu te fasses gronder à cause de moi, si on te dis quelque chose pour le tatami mouillé dis le moi, je m'arrangerais avec Taki ou avec la personne avec qui il faut arranger ce genre de choses. »

Liam se leva pour allumer la lumière et pouvoir nettoyer. Il poussa un gémissement plaintif qui montrait qu'il n'aimait pas retrouver si brutalement un éclairage intense, sans doute devait il gémir de cette façon quand la lumière le réveillait le matin. Il se frotta les yeux et vient remettre en place la théière et les tasses puis, ne sachant sans doute pas où trouver le nécessaire pour éponger ou ne voulant pas s'éloigner de Seika pour ça, il enleva sa chemise noire et s'en servit de torchon. De ce fait il révéla en pleine lumière une musculature assez impressionnante et des traces de coups de fouets dans le bas du dos.

« ça ira comme ça ? Tu n'as pas besoins de faire la vaisselle ? »

Il releva le regard vers Seika. Il avait l'air de ne pas vouloir partir et en même temps ils avaient fini. Le temps sembla se cristalliser, Liam ouvrit la bouche comme pour parler mais ne fit que sourire finalement puis il voulu enlever le collier qu'il portait se qui le fit galérer un moment parce que le lien était pas mal emmêlé.

« Tiens, prend le s'il te plait. » Il tendit le collier à Seika par dessus la table.

_ « Oh ne t'inquiètes pas, elle en a vu d'autre. »
répondit Liam d'un ton presque joyeux.
« Je dois au moins réparer mes bêtises. »
Il se rendait compte que Seika l'observait mais il pensa que c'était certainement sa façon de nettoyer qui l'intéressait plus que sa demi-nudité. En fait il avait utilisé sa chemise parce qu'il n'avait pas eu d'autre idée mais maintenant il se demandait ce que Seika pouvait penser de son corps couvert de cicatrices. Sans doute trouvait il ça moche, peut être effrayant, Liam imaginait que c'était un peu comme s'il était un insecte, l'idée de le toucher était ''beurk'', c'était crétin d'avoir montré ça à Seika.
Puis il se dit que 80% de ses cicatrices étaient là uniquement à cause de lui même, parce qu'il avait tenté des trucs trop périlleux pour lui, parce qu'il s'était viandé dans des moments d'inattention, parce qu'il n'avait pas voulu renoncer, parce qu'il avait ouvert sa gueule au mauvais moment … maintenant il fallait qu'il assume. Il imaginait que le corps de Seika était sans taches sous son kimono impeccable et il avait un peu honte de penser à ça.

_ « ça me ferait vraiment plaisir si tu voulais le mettre mais/ » il allait dire ''mais tu n'es pas obligé'' mais comme il vit Seika commencer à le mettre il se dit que ce n'était pas la peine de lui dire ça alors que ça lui faisait tellement plaisir de savoir que Seika allait le porter.

Il lui adressa le sourire le plus plein de reconnaissance et d'amour qu'il pouvait, un sourire débile d'amoureux transi pour ainsi dire et ne le quitta pas des yeux jusqu'à ce qu'il quitte la pièce.
_ « Bonne nuit Seika, merci pour ce soir. »
Il attendit de ne plus entendre son pas avant de se lever et de partir.

Il quitta l'okiya lentement, en regardant derrière lui, il porta sa main sur le collier qu'il ne portait plus. Cet objet était resté près de son cœur pendant un peu plus d'un ans. Il l'avait acheté avant de quitter la Hollande pendant qu'il tournait virait dans le port à la recherche d'un bateau sur lequel il pourrait embarquer. C'était débile d'acheter un objet inutile alors que sa réserve d'argent était limité et qu'il ne savait pas ce qui allait advenir de lui d'heure en heure mais il avait décidé que le porter le rendrait plus fort et il l'avait tellement bien décidé que ce bout de métal qui n'était même pas fait pour être un porte bonheur et qui n'était qu'en acier avait rempli son rôle démesuré sans faillir.
Il était toujours à porté de main pour pouvoir l'attraper et au fond ce qu'il faisait comprendre à Liam c'est que maintenant c'était à lui même qu'il devait se raccrocher dans les moments difficiles. Il l'avait saisit instinctivement aussi dans les moments émouvants où il aurait aimé que son frère soit d'un seul coup magiquement à côté de lui.
Ce collier renfermait les sentiments d'un voyage long d'un an, le fait d'avoir trouvé quelqu'un à qui il ait eu envie de l'offrir voulait dire beaucoup.

Soudain il se mit à courir, si il voulait que tout soit prêt pour leur promenade en voilier demain matin il avait pas intérêt à s'endormir tout de suite.